Le gouvernement exige aux détenteurs de parcelles en commune Mukaza, le centre de la mairie de Bujumbura de moderniser leurs constructions et se conformer au code de l’urbanisme. Dans une sortie médiatique faite en date du 24 août 2023, le ministre en charge des infrastructures a précisé que ceux qui ne seront pas à mesure seront indemnisés et leurs parcelles réattribuées. Les propriétaires de parcelles à Mukaza, politiciens et acteurs de la société civile sont tous contre le lancement de ce projet.
Le Burundi sera une économie émergente dans quelques prochaines années, a expliqué le ministre en charge des infrastructures Dieudonné Dukundane, d’où cette exigence à respecter le code de l’urbanisme en ce qui est des constructions dans les milieux urbains.
‘’Nous devons être une économie émergente dans les 15 ou 16 prochaines années donc nous devons tout faire pour avoir une situation de base.’’ A dit le ministre avant de déplorer qu’il existe des parcelles attribuées depuis une vingtaine d’années mais qui, pour lui, n’ont jamais été mises en valeur.
Selon le ministre Dukundane, en matière de développement chaque pays établit son plan pour arriver à son objectif.
‘’En ce qui est des constructions, le code de l’urbanisme précise dans son article 98 que les services de l’urbanisme établissent la façon dont les gens doivent construire dans différentes localités d’une ville. Pour la commune Mukaza, le code prévoit que pour des parcelles inférieures à dix ares, les constructions doivent être de trois niveaux tandis que pour les grandes parcelles qui dépassent dix ares, il faut au minimum un bâtiment de cinq niveaux. ‘’A déclaré le ministre Dukundane avant de mettre en garde ceux qui se ne conformera pas : ‘’l’article 69 du code de l’urbanisme stipule que ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas se conformer au code de l’urbanisme seront indemnisés et leurs propriétés attribuées à ceux qui peuvent ou qui le veulent rentrer dans cette vision de l’Etat.’’
Les propriétaires de parcelles craignent déjà une spoliation
‘’Nous avons reçu cette information avec beaucoup de consternation.’’ Une phrase prononcée par plusieurs des habitants de la capitale Bujumbura interviewée par la rédaction de la RPA.
Ces derniers sans s’opposer au plan de modernisation et de développement de la ville estiment qu’il y a des préalables qui s’imposent. Dans une pauvreté grandissante, peu de propriétaires de parcelles à Mukaza parviendront à se conformer à ces exigences. ‘’ Ce n’était pas le moment opportun pour lancer ce projet. Ils devraient d’abord renforcer la bonne gouvernance afin que l’économie du pays remonte et que les citoyens aient les moyens de construire les maisons respectant ces standards‘’, explique un des habitants de Bujumbura.
Face à une détermination affichée du gouvernement, certains propriétaires de parcelles à Bujumbura craignent déjà de les perdre. ’’Nous nous demandons vraiment comment nous allons faire. Nous n’avons pas de moyens pour manger comment allons-nous avoir les moyens pour construire selon ces standards. Nous trouvons que c’est le plan de ces autorités riches qui veulent s’accaparer de nos parcelles car ils savent que beaucoup ne seront pas capables d’ériger ces étages exigées.’’
Avant l’application de la mesure, des propriétaires de parcelles à Mukaza demandent un dialogue. ‘’Franchement cette décision n’était pas mauvaise en soi. Mais le problème c’est qu’elle a été prise sans consulter les concernés, les propriétaires des parcelles ; ils pourraient dialoguer et trouver un consensus. Dans d’autres pays où on a fait ce genre de projet dans les villes, les autorités du pays ont associé les concernés et ont trouvé qu’il était nécessaire de leur accorder des prêts bancaires pour les rembourser après .C’est ce qui devrait se faire ici chez nous mais ils ne l’ont pas fait.’’ Déplore un des propriétaires de parcelles à Mukaza.
Un plan de perturbation de la population
Pour Léonce Ngendakumana ancien président de l’Assemblée Nationale, le projet est difficilement réalisable actuellement au Burundi voire même impossible.’’ Comment un gouvernement qui loue encore des bâtiments peut prendre une telle mesure.’’ S’interroge l’honorable Ngendakumana qui trouve que la mesure vient perturber la population très appauvrie.
Le MSD conclut à un plan de spoliation
Le parti MSD indique que cette mesure du gouvernement qui ordonne aux propriétaires des parcelles en commune Mukaza de présenter leurs plans de constructions en étages ne vise que la spoliation des citoyens.
Les parcelles seront réattribuées aux membres du parti CNDD-FDD, affirme le MSD qui, dans un communiqué sorti le 29 août et signé par le président du parti Alexis Sinduhije, qualifie de mensonge les propos du ministre selon lesquels les parcelles appartenant à ceux qui ne sont pas à mesure de respecter les standards seront donnés à ceux qui sont capables de respecter les standards et aux Burundais de la diaspora. Pour le MSD, ‘’aucun investisseur ne peut oser investir actuellement au Burundi avec la situation qui y prévaut.’’
La société civile contre le lancement du projet
L’Association Parole et Action pour le Réveil des Consciences et l’Evolution des Mentalités s’insurge contre ce projet.
Pour Faustin Ndikumana président de PARCEM, ce projet est irréalisable puisque le gouvernement n’a même pas de projets directeurs. ‘’ Nous nous inscrivons en faux parce que la vision 2040 est encore en phase d’élaboration même le document final n’est pas encore finalisé. On comprend mal qu’il y a des planifications sectorielles bien cohérentes des ministères pour la mise en application de cette vision. On ne comprend pas cette improvisation. Il faut que ça cesse.’’ Dit le président de PARCEM qui rappelle qu’ ‘’il y a d’abord des priorités actuelles dans la ville de Bujumbura et ailleurs qui sont l’eau l’électricité. Le gouvernement a même encore des difficultés de rénover ses bâtiments qui sont archaïques.’’