Après presque 5 mois de suspension, les pourparlers inter-burundais ont finalement commencé au Palais présidentiel à Entebbe en Ouganda. Une centaine de personnes, une quinzaine de parties en tout, étaient présentes ce lundi matin pour faire entendre leur voix. Leur présence même à Entebbe était positive selon plusieurs observateurs, car il y a peu de temps, il était encore impossible de les réunir.
Le président ougandais dans une chemise jaune aux couleurs de son parti appelle ses invités à mettre en avant les intérêts des burundais qui viennent de passer 8 mois dans une crise sociopolitique : « je voulais que ce dialogue soit terminé avant les élections ce qui n’est pas été le cas». Le médiateur dans la crise a fait une leçon de politique à l’assemblée présente, indiquant que les politiques qui ne mettent pas en avant l’économie et le développement de leur pays et la population ne sont pas de bons leaders. Il a aussi fustigé l’attitude du Gouvernement qui crie à la souveraineté du pays pour dire Non à toute action extérieure visant à aider le Burundi. Museveni a rappelé que ce bouclier de souveraineté était destiné aux occidentaux mais qu’il ne peut duper les pays de la région. Pour le Président Ougandais, on e peut invoquer la souveraineté alors que des civils sont constamment tués. Yoweri Kaguta Museveni a ajouté « nous sommes ici pour trouver des solutions à la crise burundaise ».
Toutes les parties invitées ont eu de temps de parole. Le 2ème vice-président du parti au pouvoir CNDD-FDD Victor Burikukiye s’est empressé de donner les exigences de son parti, menaçant de quitter les pourparlers « si ce dialogue ne se tient pas au Burundi » et en précisant aussi que « le CNDD-FDD ne participera pas dialogue si les putschistes y sont conviés », évoquant par-là le CNARED présent à Entebbe.
La coalition de l’opposition représentée par le CNARED justement était représentée par son président. Léonard Nyagoma, opposant farouche du pouvoir Nkurunziza, a énuméré une liste d’exactions et de crimes qu’il impute au Président actuel. Cette prise de parole a suscité des remous du côté des sièges où se trouvaient d’autres « opposants ». C’est le cas d’Agathon Rwasa qui se considère comme chef de file de l’opposition mais qui fait en même temps partie du Gouvernement Nkurunziza non reconnu par la grande majorité de l’opposition et de la communauté internationale, de même que Jacques Bigirimana président des FNL reconnu par le ministre de l’intérieur qui n’ont pas eu droit au discours ce lundi. La délégation de Bujumbura n’a pas caché son énervement en quittant la salle, car elle comptait sur le discours de Rwasa qui n’aurait certainement pas tiré à boulets rouges sur le pouvoir Nkurunziza car considéré comme un « opposant-allié ».
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A la fin des cérémonies, le chef de la délégation du gouvernement adopte le même comportement que celui de son parti politique qui est le CNDD-FDD. Selon le communiqué de presse, Alain Aimé Nyamitwe, Ministre des Relations extérieures, déplore qu’ « une organisation non reconnue par la loi burundaise ait été invitée à prendre la parole au nom de toute l’opposition burundaise alors que cette dernière ne l’a ni mandaté ni approuvée ». Le ministre des Relations extérieures dit prendre acte du communiqué rendu public par la Facilitation, particulièrement le 11ème point qui dit que « il a été convenu de poursuivre le dialogue le 06 janvier 2016 à Arusha ». Pour le chef de la délégation burundaise, concernant ce point, Alain Aimé Nyamitwe fait savoir que sa délégation « rejette cette formulation car il n’y a pas eu de consensus ». Aussi, la délégation du Gouvernement n’a pas apprécié la personne désignée comme représentante des femmes, en l’occurrence Mme Marie Baricako Présidente de l’association des femmes et filles pour la paix et la sécurité. Tout comme le CNARED, le gouvernement indique que cette structure leur est inconnue et qu’elle ne peut représenter valablement les femmes burundaises.
Jusque-là, il est donc difficile de savoir si ce dialogue inter-burundais va continuer à Arusha comme annoncé étant donné que l’un des acteurs principaux menace de claquer la porte car ne voulant pas du CNARED qui exige à son tour un dialogue franc et un gouvernement de transition pour préparer des élections libres, transparentes et démocratiques « sans Pierre Nkurunziza ».