Des cadres de la police exigent des contributions forcées aux cambistes à Bujumbura
Les responsables du service des renseignements et de la police à Bujumbura cherchent à extorquer de force de l’argent aux propriétaires des bureaux de change. Ce mardi, les cambistes avaient été convoqués pour une réunion de l’association regroupant l’ensemble des propriétaires des bureaux de change de Bujumbura. Officiellement, la réunion visait à faire passer un message des autorités concernant le respect des taux de change fixés par la Banque centrale ; mais en réalité des intrus étaient présents à la réunion pour identifier les cambistes.
Tout a commencé avec une réunion tenue en catimini le 13 septembre par le chef du service burundais des renseignements en personne avec quatre propriétaires de bureaux de change considérés par le SNR comme ayant les plus gros capitaux.
Lors de cette réunion, le Général-major Etienne Ntakarutimana a rappelé aux cambistes « l’obligation de respecter les taux de change fixés par la Banque de la République du Burundi ». Celui qu’on surnomme Steeve a précisé qu’il s’agit principalement des taux du dollar et de l’euro, principales devises qui font défaut depuis plusieurs mois au Burundi suite à la crise.
Le discours n’était pas à l’échange cordial puisque le chef du SNR a menacé d’emprisonner tous les cambistes qui ne respecteront pas cet ordre. Après les menaces, Etienne Ntakarutimana leur a demandé de contribuer aux finances de l’Etat, reconnaissant que la situation économique est désastreuse. Toutefois, « il n’a pas dit dans quelle mesure ni selon quelle procédure les cambistes devraient contribuer pour la survie de l’Etat », nous indique une source proche du SNR.
Cette réunion au SNR n’était pas connue des autres propriétaires des bureaux de change. C’est ce mardi 27 septembre que les responsables de l’association des cambistes de Bujumbura ont convoqué une réunion d’urgence à l’hôtel Albatros pour échanger entre autre sur la menace qui pèse sur les propriétaires des bureaux de change, nous indiquent certains d’entre eux. Chose inhabituelle selon les mêmes sources, « des gens méconnus du métier de cambistes étaient présents dans la réunion ». Aussi, une feuille a commencé à circuler avec l’exigence d’inscrire le nom de chaque propriétaire de bureau de change qui avait répondu présent à la réunion, « ce qui ne se faisait pas dans d’autres réunions car nous nous connaissons tous », poursuivent nos sources.
Les propriétaires des bureaux de change précisent que parmi les personnes inconnues qui participaient à la réunion, une dame les a intrigués. A force d’être interrogée, elle a avoué qu’elle ne possède pas de bureau de change mais qu’elle faisait quand même le travail de cambiste. Elle avait apparemment été envoyée pour relayer le message des responsables du service des renseignements et de la police : à savoir le respect strict des taux fixés par la BRB sous peine d’être envoyés à Mpimba, nous indique nos sources.
Dès le lendemain, ce mercredi, les craintes des cambistes se sont confirmées. « Des émissaires ont été envoyés pour sillonner la soixantaine de bureaux de change de Bujumbura et exiger à chaque cambiste de verser 225.000 francs tous les trois mois au commissaire de police de la Mairie appelé Monfort ainsi qu’au commandant de la zone centre de police surnommé ‘’Facebook’’ », expliquent les agents des bureaux de change contactés. D’après nos sources, cela représente près de « 14 millions de francs extorqués de force » auprès des cambistes de manière illégale.
Les mêmes émissaires ont clairement indiqué que quiconque se déroberait à ces contributions serait envoyé en prison et son bureau fermé. « Finalement, les demandes de contribution exigées par le SNR n’étaient pas pour les caisses de l’Etat mais pour certains individus », dénoncent nos sources qui craignent de plus en plus pour leur sécurité.
Cette contribution trimestrielle de 225.000 francs par bureau de change ne serait destinée qu’aux responsables de la police en mairie de Bujumbura. Certains cambistes indiquent avoir été prévenus que des émissaires du service des renseignements et du parti au pouvoir CNDD-FDD veulent aussi extorquer de l’argent aux propriétaires des bureaux de change.
Nos sources indiquent que ces contributions forcées risquent d’avoir comme effet « la flambée des taux de change au marché noir », où circule le gros des devises depuis la mesure de restriction imposée par la BRB. Pour le moment, le dollar se change entre 2500 et 2600 francs au marché noir et entre 1650 et 1690 au taux officiel de la BRB.
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