C’est ce lundi que le correspondant de RFI aujourd’hui en exil a été primé au Ministère des affaires étrangères par le patron du Quai d’Orsay. Esdras Ndikumana était ému. Laurent Fabius, Ministre français des affaires étrangères a expliqué aux diplomates et journalistes présents le pourquoi du choix de cet ancien professeur de Mathématiques aujourd’hui correspondant de RFI et de l’Agence France Presse à Bujumbura mais en exil à Nairobi « ce correspondant a été choisi pour avoir exercé de manière dévouée son métier dans des conditions politico-sécuritaires extrêmement difficiles dans son pays, jusqu’à y risquer sa vie ».
Prenant la parole à son tour, Esdras Ndikumana déplore que les efforts d’un journaliste burundais soient reconnus par les étrangers. « Notre rôle, c’est plutôt d’aider les dirigeants à voir ce qui ne marche pas. C’est la meilleure façon d’aider un pouvoir. Ne pas dire les choses comme il l’entend, mais comme elles sont ». Le correspondant de RFI et AFP a dédié son prix à tous les journalistes burundais avec un sentiment de satisfaction « je ressens un sentiment de joie et de fierté après la réception de ce prix qui vient récompenser mon travail, mais aussi toute la presse indépendante burundaise, qui a été détruite durant la crise et dont la grande partie des journalistes ont dû fuir le pays par crainte pour leur vie » aterminé Esdras Ndikumana lui aussi en exil à Nairobi au Kenya.
Primé après avoir été torturé au Burundi
Dimanche 2 août 2015 restera une date que le correspondant ne pourra pas oublier de sa vie. Vers 8h30, il reçoit une information selon laquelle le ‘’tout puissant’’ Lieutenant-général Adolphe Nshimirimana vient d’être assassiné par un commando sur le boulevard du 28 novembre à l’entrée de la zone Kamenge. Après l’attentat, tous les hauts gradés de l’appareil sécuritaire arrivent sur place tous sur leur nerfs sans oublier les jeunes Imbonerakure du parti au pouvoir qui jurent de venger leur ‘’héros’’, l’homme qui était considéré comme vari maître de l’appareil sécuritaire et de répression du Président Nkurunziza.
Au moment où il prenait des photos de la scène, Esdras Ndikumana a été arrêté par des agents du service des renseignements et conduit au bureau du SNR où il sera sérieusement passé à tabac durant 2 heures sous les regards du chef de Renseignement intérieur le commissaire de police Bertin Gahungu. Orteils et doigts cassés, son matériel endommagé ; le journaliste sera laissé mourant et conduit dans un hôpital de Bujumbura puis évacué vers l’étranger pour les soins appropriés.
Aujourd’hui le rapport d’enquête sur les traitements infligés au correspondant de RFI et AFP promis par le Cabinet du Président Nkurunziza lui-même se fait toujours attendre. Le 19 octobre 2015, deux plaintes ont été déposées au bureau du procureur général de la République : une plainte au nom d’Esdras Ndikumana où notre confrère raconte comment il a été injustement arrêté sur les lieux de l'assassinat du Lieutenant-général Adolphe Nshimirimana, à Kamenge, alors qu'il travaillait. L’autre plainte est celle de RFI et l'AFP, les employeurs du journaliste. Les deux médias et leur correspondant estiment que « ces faits constituent une violation de la Convention contre la torture, mais aussi du Code pénal burundais sur au moins deux points : torture et extorsion ».
