C'est devenu une habitude. Au lendemain de chaque sortie d'un rapport d'enquête des experts des Nations-Unies sur le Burundi, les autorités burundaises rivalisent pour organiser des activités, des manifestations ou multiplier des déclarations pour nier les contenus de ce rapport.
C'est dans ce cadre qu'un débat parlementaire a été organisé ce mardi à l'hémicycle de Kigobe, un débat qui a vu la participation des deux chambres réunies.
Malheureusement, il s'agit d'un pseudo-débat car toute personne qui ose dire le contraire des lignes directrices tracées par le pouvoir NKURUNZIZA s'attire tous les foudres. C'est le cas du parlementaire de la circonscription de Bubanza, Fabien BANCIRYANINO. Dénonçant l'attitude peu diplomatique de Bujumbura, il a invité ses collègues à reconnaître que des crimes sont monnaie courante au Burundi. "Les disparitions sont légion au Burundi. Seulement, nous ne retrouvons plus les cadavres. L'exemple récent est celui de Bugendana. Cela gonfle l'effectif des disparus. En ce qui concerne les réfugiés, les tambourinaires ne sont pas rentrés. Cela augmente l'effectif des réfugiés. A mon avis, il faut apprendre aux membres du gouvernement de privilégier plutôt un langage diplomatique".
Il devient vite la cible du pouvoir. Dans un sourire sarcastique, le Président de l'Assemblée Nationale le taxe de traitre si pas de mercenaire des experts des Nations-Unies. "C'est indéniable que tu les as aidé dans la rédaction du rapport. Je pense que tu nous donneras un peu d'argent sur ton gain".
Pire, c'est le gouvernement qui contrôle le parlement. La ministre de la justice menace de poursuivre Fabien BANCIRYANINO. Une forme de terreur que la ministre déclencherait par une simple demande au Président de l'Assemblée Nationale. " Si quelqu'un tient des propos non vérifiés, nous saisirons le Président de l'Assemblée Nationale pour déclencher une poursuite judiciaire pour qu'il donne des preuves"
En somme, la démarche de Bujumbura n'épouse que le format de nier tout en bloc. Comme le ridicule ne tue pas, la ministre de la justice n'a cessé de donner le ton dans ce sens. "Nous rejetons en bloc ces experts et leur rapport".
Egalement, la sénatrice Victoire NAHIMANA du CNDD-FDD rivalise pour nier la fermeture des médias et la persécution des journalistes et propose le rapatriement de ces derniers pour leur réserver un sort particulier. "Nous demandons aux pays hôtes de nous remettre ces journalistes et nous saurons le sort à leur réserver".
Révérien NDIKURIYO, Président du sénat, plonge dans un négationnisme sans nom en voulant se justifier sur le tristement célèbre vocable "kora" utilisé lors du génocide rwandais. Une justification qui cache mal la peur entretenue par Bujumbura vis-à-vis du contenu du rapport des experts. "J'ai dit Kora en Kirundi. Comment l'interpréter comme tuer des gens? Comment un belge ou un français peut comprendre ce vocable en Kirundi?".
Autant d'éléments illustratifs de la stratégie et de la démarche suicidaire du pouvoir de Bujumbura.