Bujumbura ou la ville dorénavant masquée
Après le boom des cas positifs à la covid-19, la nouvelle mesure du port obligatoire du masque est une décision qui, semble-t-il, était très attendue par tous les burundais. Est-ce une prise de conscience tardive des burundais ? Un petit tour dans la ville de Bujumbura pour une ambiance très différente de celle à laquelle nous sommes habitués.
Jeudi le 14 janvier 2021, il est 7 heures du matin à Bujumbura. Comme d’habitude, la ville ne roule jamais aussi vite qu’à cette heure. Bref, un matin comme les autres. Mais une grande différence se remarque sur les visages des chauffeurs et passagers à bord de transport en commun, les bus, les motos, les vélos et même dans les voitures des particuliers. Tout le monde porte des masques. Après la décision de la mairie de Bujumbura du port obligatoire de masque pour tous les transports en commun, les citadins semblent avoir pris conscience de la gravité de la situation du corona virus.
Nous commençons notre tour à Kamenge, la commune la plus peuplée de Bujumbura. A cette heure de la journée, tout le monde roule vite. Je m’arrête au Terminus dans un parking de Taxi-vélos et je ne porte pas de masque. Je demande au Taxi-vélo de m’emmener à 4km du point de départ. Curieusement, le premier geste qu’il pose est de sortir une solution hydro alcoolique pour que je puisse me désinfecter et il me pose la question de savoir si j’ai sur moi un masque. Je lui réponds que non et il refuse de me prendre avec lui. Je décide de tenter avec un bus, le conducteur me refuse l’accès aussi. Je sors mon masque de sa cachette et embarque dans le bus et part pour la ville. Dans le bus, nous sommes très serrés et personne ne parle. Au nombre de cinq sur une rangée, tout le monde porte des masques mais pas sur la bouche. Certains l’enlèvent dès qu’ils entrent à l’intérieur et le garde sous la main, d’autres le portent sous le menton, les autres sur la tête. Arrivé en ville, les piétons ne portent pas de masques mais les policiers se mettent petit à petit en place. Certains se placent dans le parking des bus, d’autres devant le marché des téléphones communément appelé ‘’BATA’’. D’autres sont un peu éparpillés, non pas pour surveiller l’ordre dans les parkings, mais pour attraper quiconque passe outre la mesure de la mairie. Au loin, un policier emmène deux personnes. Je m’approche pour demander à un autre passant et il me fait savoir qu’ils ont été surpris en train de se donner la main.
D’après un observateur, cette mesure est un soulagement : ‘’Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement a pris autant de temps pour se rendre compte que le corona est réel et dangereux. Mais mieux vaut tard que jamais’’. Même les marchands ambulants s’y conforment. ‘’ Si ça peut rassurer mes clients et me protéger moi-même, je n’y vois aucun mal.’’ Nous a murmuré Marie, une vendeuse de mangues. D’autres se disent gênés par ces masques qui, selon eux, les empêchent à mieux respirer. Ceux-là préfèrent jouer au chat et à la souris avec les policiers. Ce comportement s’observe surtout chez les convoyeurs qui pensent que ‘’le corona est une maladie des riches.’’ M’a confié l’un d’eux.
Prise de conscience, ou peur de se faire embarquer par la police ? Dans tous les cas, cette mesure semble avoir sorti les burundais de leurs zones de confort.