Destitution d’Agathon RWASA à la tête du parti CNL
Un congrès controversé du parti CNL a désigné le nommé Nestor Girukwishaka comme président du parti CNL en remplacement d’Agathon Rwasa, fondateur de cette formation politique. Organisé ce 10 mars au chef-de la province Ngozi, le congrès extraordinaire a suscité de vives tensions entre les fidèles d’Agathon Rwasa et les organisateurs qui comprenaient les députés de ce parti qui se sont rebellés contre le fondateur du parti.
Dirigé par la députée Marie Immaculée Ntacobakimvuna, l’un des dix députés dissidents du parti Congrès National pour la Liberté, le congrès s’est tenu ce dimanche 10 mars au chef-lieu de la province Ngozi avec un grand soutien du parti au pouvoir le CNDD-FDD. Ainsi, dans toutes les provinces du pays, il a été dépêché des bus, dont ceux de l’office de transport public OTRACO, pour déplacer les participants à ce congrès.
Dans la ville de Gitega la capitale politique, le bus transportant ces congressistes était convoyé et sécurisé par une camionnette pick-up avec de nombreux militaires à bord. De l’autre côté, les adeptes du leader de ce parti Agathon Rwasa s’étaient préparés pour empêcher la tenue du congrès qu’ils jugeaient illégal. Les députés fidèles à Agathon Rwasa étaient sur le lieu, mais ils se sont heurtés à la résistance des policiers et militaires déployés à partir de différentes régions. Ils ont par la suite été rassemblés sur un terrain sous un soleil accablant et personne n’était autorisée à les approcher ne fusse que pour leur donner de l’eau à boire. La surveillance était assurée par le gouverneur de la province Ngozi, le procureur de la République et le responsable du Service National de Renseignements dans cette province du nord du pays.
D’autres membres du parti CNL ont également été arrêtés dans différentes provinces. En province Muramvya, le bus qui déplaçait des adeptes d’Agathon Rwasa a été intercepté et les passagers emprisonnés. De même qu’en province Kayanza, les responsables du parti CNL ont été arrêtés.
Nestor Girukwishaka a été donc élu par ce congrès de Ngozi pour remplacer l’honorable Agathon Rwasa. Il a été élu pour un mandat de cinq ans.
Le gouvernement cité dans cette crise du CNL
Depuis juin 2023, les activités du parti CNL ont été suspendues sur tout le territoire national. Les raisons données par le ministère de l’intérieur étaient qu’ « ils voulaient éviter de probables affrontements entre parties en conflit au cours d’une activité quelconque du parti », qu’il fallait donc d’abord résoudre le différend entre eux. Interrogé sur les dirigeants reconnus de ce parti, Pierre Nkurikiye porte-parole du ministère de l’intérieur a, lors de la conférence animée par les porte-paroles de différents ministères en juillet 2023, répondu que ce sont les organes de 2019 qui restent légaux, donc Agathon Rwasa comme président du CNL.
Agathon Rwasa, en qualité de président du parti, a demandé de tenir un congrès le 02 de ce mois de mars, mais le ministère de l’intérieur a refusé.
Pamphile Malaika, un des députés pro Rwasa qui s’étaient rendus à Ngozi ce dimanche accuse le gouvernement de violer la loi fondamentale du pays. « Le seul habilité à convoquer un congrès extraordinaire est le président du parti, il l’a fait mais le ministre de l’intérieur n’a pas donné l’autorisation. Le gouvernement viole l’article 80 de la Constitution en s’ingérant dans l’organisation de notre parti. »
Ce député explique qu’ils s’étaient rendus à Ngozi pour être eux-mêmes des témoins oculaires de la violation des lois du pays. « Participent dans un congrès extraordinaire, les membres statutaires du parti et nous savons bien que la majorité de ces membres statutaires sont du côté de Rwasa. Nous nous sommes rendus sur les lieux pour voir qui étaient les participants. La plupart des participants étaient des imbonerakure du parti au pouvoir. »
L’issue de ce congrès est donc rejetée par le camp Rwasa. Selon le député Pamphile Malaika, « ils vont continuer leur combat politique en tant que CNL toujours dirigé par Agathon Rwasa. »
Pour le politique Tatien Sibomana, il n’y a plus aucun doute, c’est le parti CNDD-FDD qui est en train de détruire le parti CNL. « À voir la force utilisée pour sécuriser cette activité, c'est clair que c’est le parti au pouvoir qui élimine déjà ses concurrents dans les prochaines élections. »
Dans un communiqué sorti ce 09 mars, le Réseau Panafricain des Leaders de l’opposition avait aussi dénoncé cette ingérence dans la gestion du parti CNL. Ce Réseau des Leaders de l’Opposition en Afrique avait exhorté les autorités burundaises à renoncer à toute ingérence injustifiée dans les affaires du parti CNL ou tout autre parti de l’opposition, à respecter les principes de la démocratie, l'État de droit et les droits de l'homme tels que prévus dans le Traité de la Communauté de l'Afrique de l'Est.
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Photo: Nestor Girukwishaka, élu président du parti CNL par les congressistes de Ngozi