Dossier KIRA Hospital : Un réquisitoire lourd pour un dossier vide
Une peine de 5 ans d’emprisonnement est la sentence requise par le parquet ce dimanche 15 décembre 2024 à l’endroit des Docteurs Christophe Sahabo et Jean-David Pillot ainsi qu’un paiement d’une amende respectivement de sept millions et de deux cent mille francs burundais. Un réquisitoire jugé fantaisiste par ceux qui suivent de près ce dossier, à voir le manque de preuves de la partie accusatrice.
Comme constaté lors des rares audiences y relatives, les avocats de l'État ont montré encore une fois qu’ils n’avaient aucune preuve tangible de ce qu’ils avancent, et ce, durant tout le procès qui a débuté jeudi 12 décembre, procès mis en délibéré ce lundi 16 décembre.
Selon un des envoyés spéciaux de la RPA à Ruyigi, les accusations étaient fallacieuses en plus de concerner des faits prescrits.
En effet, la première accusation était portée sur le fait que l’hôpital KIRA s’est soustrait de son obligation de fournir un bilan d’ouverture. Une accusation balayée d’un revers de la main par la partie défenderesse qui a fourni les procès-verbaux ainsi que le bilan d’ouverture adopté en juin 2016 par l’Assemblée Générale. De plus, cette accusation n’avait pas lieu d’être vu qu’elle tombe sous le coup de la prescription, étant donné que la durée pour les délits économiques est de trois ans.
Une autre accusation présentée par les avocats de l’État concerne le faux et usage de faux. Une accusation qui s'est basée sur un soi-disant PV frauduleux. Ici, la partie défenderesse a fait savoir à la cour que cette accusation est juste une perte de temps vu qu’on ne peut pas tenir compte d’un brouillon et en conclure qu’il s’agit d’un faux et usage de faux juste parce qu’il ne comporte aucune signature ni cachet, d’autant plus qu’à l’entête dudit brouillon était écrit ‘’PV Provisoire’’. Et les avocats de la défense d’exiger un écrit sanctionnant des brouillons ne comportant aucune signature.
Le lendemain, la partie accusatrice est revenue à la charge, avec cette fois-ci, une autre accusation. En effet, les avocats de l’État ont juré que les actionnaires privés européens ne sont que des usurpateurs. Parés à toute éventualité, les avocats de la défense s’étaient munis de tous les procès-verbaux et de tous les rapports financiers prouvant la participation de tout un chacun au capital de KIRA Hospital. Pour prouver que la partie accusatrice mentait sciemment, des rapports datés d’avant l’emprisonnement du Docteur Christophe Sahabo et comportant la signature de Charles Ndagijimana, actuel président autoproclamé du Conseil d’administration, ont été présentés à la cour. Des rapports appuyés par les déclarations d’impôts de 2023 et 2024 certifiées par l’OBR, lesquelles déclarations reconnaissent les actionnaires suisses comme étant majoritaires. Ce qui n’a pourtant pas empêché le parquet de requérir une peine de 5 ans d’emprisonnement à l’encontre des deux médecins, à savoir le Docteur Christophe Sahabo et le Docteur Jean-David Pillot, accompagné d’une amende de 7 millions de francs burundais et de 200 milles pour le second, peine réclamée sur base de l’accusation de faux et usage de faux pourtant rejetée.
Un procès qui défraie la chronique
S’accaparer de l’hôpital KIRA en écartant ses principaux actionnaires est un plan longtemps planifié par le gouvernement de Gitega, et ce longtemps même avant l’emprisonnement du Docteur Christophe Sahabo. Ceci transparait dans les accusations fallacieuses portées par la partie dite civile qui représente en réalité les intérêts de l’Etat à travers la société SOCABU.
En effet, la partie accusatrice a mis en avant le crime de faux et usage de faux, un délit retenu d’ailleurs par le parquet qui a requis cinq ans de prison à l’encontre du Docteur Christophe Sahabo, ancien directeur général de l’hôpital KIRA et du Docteur Jean-David Pillot qui fut président du conseil d’administration dudit hôpital.
Selon l’envoyé spécial de la RPA à Ruyigi, le Service National des Renseignements a été cité comme témoin de cette fraude. La preuve présentée était un ordinateur portable du Docteur Christophe Sahabo, lequel avait été subtilisé par des gens jusque-là inconnus. Cette preuve a étonné et les magistrats et les juges qui étaient présents vu que le SNR n’avait ni mandat de perquisition de ladite machine, encore moins un quelconque procès-verbal de perquisition. Ce qui a poussé les juges à rayer de la liste cette preuve. Raison pour laquelle le ministère public n’a pas tenu compte de cette preuve présentée par la documentation.
Néanmoins, la partie accusatrice ne s’est pas avouée vaincue pour autant, car décidée coûte que coûte à faire couler les actionnaires majoritaires privés lésés. Ici, notre source fait savoir que la SOCABU s’était représentée comme partie civile et a exigé des dommages et intérêts pour soi-disant des préjudices subis. Ces dommages et intérêts étaient scindés en deux. La première partie comprenait 9 millions d’euros que le Docteur Jean-David Pillot devrait verser à la SOCABU. Quant à la deuxième partie, elle concerne les dommages de 10 milliards de francs burundais que le Docteur Christophe Sahabo devra verser à cette entreprise étatique. Ce qui a surpris plus d’un, c’est que la SOCABU n’a pas pu montrer sur quoi ils se sont basés pour faire ces calculs. Un autre fait qui a troublé l’auditoire, c’est de voir comment la SOCABU exige de tels montants au moment où le coût global du projet de l’hôpital était autour de 12 millions d’euros, en plus du fait que c’est le gouvernement qui contrôle et gère aujourd’hui toutes les infrastructures et matériels dudit hôpital.
D’où certains analystes trouvent que le Burundi n’est pas prêt de réussir à attirer des investisseurs étrangers avec de tels agissements, et surtout avec le comportement de la justice burundaise qui, au lieu de rétablir dans leurs droits les personnes lésées, s’acharne plutôt sur les victimes.