A qui profiterait la mort du Docteur Sahabo ?
Auditionné pour la 3ᵉ fois, le docteur Christophe Sahabo n’a pas pu aller au bout de l’audience. En effet, ayant comparu dans un état très critique, il a eu un malaise. Ce qui n’a pas empêché le Procureur Général de l’arracher aux soins lui prodigués à l’hôpital Roi Khaled pour le ramener à la prison centrale de Ruyigi. Un geste interprété par bon nombre de défenseurs des droits humains comme l’extériorisation des intentions criminelles du pouvoir de Gitega à l’encontre de ce médecin.
Après des heures passées au Tribunal de Grande Instance de Muha en compagnie de son médecin, le Docteur Christophe Sahabo a finalement pu être évacué vers l’hôpital Roi Khaled à la fin de la journée de ce mardi 10 septembre. La santé du Dr Sahabo s’est détériorée en pleine audience. Mais son répit n’aura duré que le temps de la rosée, car moins de 48 heures après son admission, Gitega a pris la décision d’interrompre les traitements lui prodigués.
Nos sources parmi le personnel soignant prestant à l’hôpital Roi Khaled font savoir que les sérums ont même été arrachés de ses bras avant qu’il ne soit embarqué dans un véhicule apprêté pour le ramener à la prison centrale de Ruyigi où il est écroué depuis plus de deux ans. Une décision prise par le Procureur Général, Léonard Manirakiza qui a préféré ignorer les recommandations des médecins qui tenaient à ce que le patient reste alité au moins pendant quatre jours afin qu’ils puissent lui faire tous les examens nécessaires.
Selon nos sources, même l’intervention de la CNIDH, la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme, n’a rien donné. Ce qui a alarmé les défenseurs des droits de l’homme qui redoutent des intentions mal cachées visant à éliminer physiquement ce médecin.
« Nous avons suivi avec attention ce dossier. Mais comme vous le savez, le docteur Sahabo est emprisonné pour des motifs non encore avoués jusqu’ici. Même si c’est désolant qu’il soit présentement en prison à Ruyigi, pour moi, c'est une chance inouïe, car le plan était de l’éliminer physiquement. Je détiens de sources fiables une information révélant que lors de son arrestation, le plan était de le tuer, mais cela n’a pas marché parce que le docteur Sahabo était en compagnie d’un partenaire blanc. C’est uniquement ça qui lui a sauvé la vie. Alors, ils le privent de soins pour qu’il succombe de mort naturelle. Mais qu’ils ne se trompent pas. Laisser mourir sciemment un détenu en lui refusant l’accès aux soins de santé est crime grave. » A déclaré Pierre Claver Mbonimpa, président de l’APRODH, une association de défenseurs des droits des prisonniers.
Un point de vue partagé par l’homme de droit, Me Gustave Niyonzima qui plaide pour que le détenu Christophe Sahabo ne soit pas privé de ses droits les plus élémentaires : « Ça fait plus de deux ans et demi que le Docteur Christophe Sahabo est incarcéré illégalement, dans des conditions inhumaines. Son dossier a toujours été émaillé par beaucoup d’irrégularités notoires au niveau de la procédure pénale. Avant sa comparution, il avait demandé depuis huit jours qu’on l’autorise à consulter un médecin, mais en vain.
On voit bien qu’il y a un acharnement à son égard. Ils sont même allés jusqu’à changer sa garde par des agents du Service National des Renseignements qui dépendent directement de la présidence. Durant tout son séjour à l’hôpital, il n’a jamais autorisé à voir sa famille et ses avocats. Même certains officiels accrédités au Burundi n’ont pas été autorisés à l’approcher. Bref, ils veulent le faire souffrir au maximum. C’est pour cela que nous interpellons le ministère public pour qu’il fasse diligence afin qu’il soit traité avec dignité puisque la loi carcérale donne le droit à un prévenu de se faire soigner correctement et de pouvoir défendre sa cause étant dans un état de santé propice. » A tenu à souligner Me Gustave Niyonzima, un juriste burundais qui suit de près ce dossier.
Arrêté en avril 2022, Docteur Christophe Sahabo a comparu pour la première fois le 05 mai 2023, exactement 13 mois après son incarcération. Le crime lui reproché est l’atteinte à l’économie nationale, un crime lui collé juste pour s’être opposé à la spoliation de l’Hôpital KIRA dont il était en charge.
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Photo : Dr Christophe Sahabo